PRESENTATION DES LIVRES DU FIL ROUGE

Une liste non exhaustive sur le thème « Le rapport au Père »



Livres proposés par Nicole

Une année avec mon père – Geneviève BRISAC
Après un terrible accident de voiture, Maman est morte. Papa a survécu et il rentre chez lui. Il doit apprendre à vivre seul. Aux tracas du quotidien se mêlent les souvenirs du passé qu’il partage avec sa fille. Il décrit sa vie, la vie d’un Français, juif laïque et républicain qui a traversé des guerres, des années de labeur, des chagrins d’amour et aussi de grands bonheurs, les secrets d’une vie bien remplie. 





Un bon fils – Pascal BRUCKNER
C'est l'histoire d'un enfant à la santé fragile. Né après guerre dans une famille d'origine et de culture allemandes, il est envoyé dans un village d'Autriche pour soigner ses poumons. Sous la neige, il prie chaque soir le Seigneur de provoquer la mort de son père. Ce dernier, antisémite et raciste, est un mari pervers qui bat sa femme. Son fils unique fera tout pour devenir son contre-modèle. Il sera l'élève de Jankélévitch et de Barthes, le jumeau spirituel d'Alain Finkielkraut, puis un écrivain reconnu. Jusqu'au dernier jour, il accompagnera pourtant cet étranger qui lui a donné la vie. Car au-delà du mépris et de la rage, ce récit est l'aveu d'un amour impossible à renier d'un fils pour son père auquel il doit paradoxalement toute son œuvre. 


 Profession du père – Sorj CHALANDON "Tu connais ton père", disait la mère d'Emile. Un jour, il était parachutiste. Le lendemain, habillé en pasteur, il obligeait son fils à s'agenouiller pour être exorcisé. Et le soir, il lui avouait à voix basse être un agent secret américain. En pleine nuit, le père d'Emile s'est réveillé rebelle. Soldat clandestin chargé d'une mission supérieure : assassiner De Gaulle. Mais pour tuer le général, il fallait être deux. C'est comme ça qu'Emile a été enrôlé par son père dans l'organisation secrète. Alors, il était heureux, Emile. De plaire à son père, de ne plus être battu. Mais aussi, il avait terriblement peur. Parce qu'à 13 ans, c'est lourd un pistolet. C'est pour ça qu'il a demandé à Luca de rejoindre le complot. Luca était Pied-Noir. Tout juste rapatrié d'Algérie, le collégien voulait se venger du général. "Tout ça, c'est des bêtises", disait la mère d'Emile. Pour rassurer son enfant, elle lui répétait : "Tu sais bien que ton père est malade". Non, Emile ne le savait pas. Le père était tellement malade que même le fils a failli en mourir.


Le chagrin – Lionel DUROY
De l'occupation à nos jours, Lionel Duroy retrace la lente déliquescence d'une famille au fil des événements terribles de la seconde moitié du siècle. Le portrait d'un enfant pris au piège de la fatalité familiale. 







Ramon – Dominique FERNANDEZ
« Je suis né de ce traître, il m’a légué son nom, son œuvre, sa honte. »
Ainsi parle Dominique Fernandez de son père Ramon, à l’orée de cette enquête biographique, historique et intime. Le fils cherche à comprendre comment son géniteur, l’un des plus grands intellectuels de son temps, a pu être socialiste à trente et un ans, critique littéraire d’un journal de gauche à trente-huit, compagnon de route des communistes à quarante, fasciste à quarante-trois et collabo à quarante-six… 




L’ombre en soi – Jean GREGOR
Comprendre l’homme qui avait renoncé à tuer son père. Tel fut le projet qui s’est imposé à Jean Grégor, comme une urgence littéraire. De son adolescence, l’auteur a gardé le souvenir des moments passés en famille dans la maison des environs de Paris, mais aussi des coups de téléphone anonymes et des visiteurs qui passaient sans s’annoncer, venus du continent africain ou dépêchés par les renseignements généraux. Son père, Pierre Péan, menait en journaliste indépendant des enquêtes qui commençaient à déranger. Et c’est pourquoi un certain Jean-Michel fut payé afin qu’il lui arrive un accident. Mais ce contrat ne se déroula pas comme prévu, et Péan eut la vie sauve. Ce sont, paraît-il, des choses qui arrivent, les aléas du métier en quelque sorte. Moins fréquent, en revanche : Péan se débrouilla pour entrer en contact avec Jean-Michel, et ils devinrent amis. Désormais écrivain, Jean Grégor soumet cette amitié hors normes à une investigation romanesque. Se confronte à ce qu’un enquêteur appellerait le facteur humain”, qui lui apporte un autre regard sur Péan et sur lui-même. C’est en Afrique, où l’ami de Péan habitait désormais, que fut fixé l’étrange rendez-vous. Ce qu’il espérait y trouver, le romancier n’en savait rien. Les confessions d un homme que tout éloigne de l’ordinaire ? Le secret d une amitié échappant à tout artifice ? L’image d’un père magnanime ? Ce qu’il découvrit est plus simple et plus compliqué : le sentiment d’être vivant comme il ne l’avait jamais été, et l’infini questionnement sur le prix de cette vie. 


Un secret – Philippe GRIMBERT
Souvent les enfants s'inventent une famille, une autre origine, d'autres parents. Le narrateur de ce livre, lui, s'est inventé un frère. Un frère aîné, plus beau, plus fort, qu'il évoque devant les copains de vacances, les étrangers, ceux qui ne vérifieront pas... Et puis un jour, il découvre la vérité, impressionnante, terrifiante presque. Et c'est alors toute une histoire familiale, lourde, complexe, qu'il lui incombe de reconstituer. Une histoire tragique qui le ramène aux temps de l'Holocauste, et des millions de disparus sur qui s'est abattue une chape de silence.



Le zubial – Alexandre JARDIN
« Le jour où mon père est mort, le 30 juillet 1980, la réalité a cessé de me passionner. J'avais quinze ans, je m'en remets à peine. Pour moi, il a été tour à tour mon clown, Hamlet, d'Artagnan, Mickey et mon trapéziste préféré ; mais il fut surtout l'homme le plus vivant que j'ai connu. Pascal Jardin, dit le Zubial par ses enfants, n'accepta jamais de se laisser gouverner par ses peurs. Le Zubial avait le talent de vivre l'invivable, comme si chaque instant devait être le dernier. L'improbable était son ordinaire, le contradictoire son domaine. S'ennuyait-il au cours d'un dîner ? Il le déclarait aussitôt et quittait la table, en baisant la main de la maîtresse de maison. Désirait-il une femme mariée ? Il ne craignait pas d'en faire part à son époux, en public, et d'escalader la façade du domicile conjugal le soir même pour tenter de l'enlever. S'il écrivit des romans et plus de cent films, cet homme dramatiquement libre fut avant tout un amant. Son véritable métier était d'aimer les femmes, et la sienne en particulier. Ce livre n'est pas un recueil de souvenirs mais un livre de retrouvailles. Le Zubial est l'homme que j'ai le plus aimé. Il m'a légué une certaine idée de l'amour, tant de rêves et de questions immenses que, parfois, il m'arrive de me prendre pour un héritier.» A. J. 


Un père – Sibylle LACAN
Un père. L'article indéterminé du titre pourra paraître paradoxal quand on sait que l'auteur est la fille du psychanalyste Jacques Lacan. Précisément, Sibylle Lacan expose dans ce titre le parti pris qui fut le sien : « parler du père que Jacques Lacan fut pour moi, non de l'homme en général, et encore moins du psychanalyste.» La relation de n'importe quelle fille à son père porte toujours en elle un petit coin d'enfer. Mais ce qui atteste de cette détresse quand le temps passe, c'est l'amour blessé au lieu même de notre langage. C'est pourquoi ce livre ne peut être défini comme un roman ou une autobiographie mais comme la volonté forcenée d'expression et d'authenticité par laquelle une femme conquiert sa propre langue. 


L’africain – J-M Gustave LE CLEZIO
« J'ai longtemps rêvé que ma mère était noire. Je m'étais inventé une histoire, un passé, pour fuir la réalité à mon retour d'Afrique, dans ce pays, dans cette ville où je ne connaissais personne, où j'étais devenu un étranger. Puis j'ai découvert, lorsque mon père, à l'âge de la retraite, est revenu vivre avec nous en France, que c'était lui l'Africain. Cela a été difficile à admettre. Il m'a fallu retourner en arrière, recommencer, essayer de comprendre. En souvenir de cela, j'ai écrit ce petit livre. » 




La reine du silence – Marie NIMIER
« Mon père a trouvé la mort un vendredi soir. Son Aston Martin s'est écrasée contre le parapet d'un pont. Je n'étais pas dans la voiture. J'avais 5 ans. De lui, il me reste peu de souvenirs, et quelques trésors : une montre qui sonne les heures, un stylo dont la plume penche à droite et cette carte postale, où il me demandait en lettres capitales : Que dit la reine du silence ? Cette phrase posait une énigme impossible à résoudre pour la petite fille que j'étais, énigme cruelle et envoûtante qui résume toute la difficulté du métier d'enfant. Énigme qui, à l'époque, se formulait ainsi : Que pourrait bien dire la Reine du silence sans y perdre son titre, et l'affection de son papa ? Ou encore : comment, à la fois, parler, et ne pas parler ? J'étais coincée. Prise au piège de l'intelligence paternelle. » Marie Nimier ose avec ce nouveau livre s'attacher à la figure de son père, Roger Nimier. Elle explore l'amas de tôles froissées, interrogeant avec gravité le destin de cet écrivain que ses amis décrivent tour à tour, et parfois simultanément, comme un être désinvolte, sérieux, menteur, loyal, tendre, indifférent et malhabile de ses sentiments comme on est maladroit de ses mains. 


L’homme de ma vie – Yann QUEFFELEC
« Qui était mon père ? Un homme doux, mystérieux, sans pitié. J’ai passé mon enfance auprès d’un inconnu que j’aimais, admirais, dérangeais. Je m’étais trompé de famille, disait-il avec ironie, comme s’il regrettait de m avoir engendré. Cette phrase me blessait. Moi qui voulais seulement devenir ce qu’il était ou personne : avoir ses yeux bleus, ses mains, sa taille de géant, son talent. Il est parti en emportant ses secrets, presque tous. Mon père détestait l’automobile, sa bête noire, un progrès devenu fléau. Il n’avait pas le permis de conduire, évidemment non ! Il traversait l’existence à pied. Un homme aux semelles de vent, comme dit l’autre, un père aux dix mille horizons. Marcher, c’est être libre, expliquait-il à ses enfants, la marche ne doit d’allégeance à aucun seigneur. Qui l’aime le suive : on marchait sur ses pas, lui toujours en avant d’une foulée. Entendait-il protester, la foulée s’allongeait. Tout en marchant, il s’adressait au monde entier qui venait à sa rencontre, aux arbres, aux animaux, aux frères humains. Une fois par semaine, aussi rituellement qu’il allait à la messe, il partait se ressourcer en forêt. L’été, les randonnées se faisaient croisières terrestres avec Rolf, son ami d’enfance, grand marcheur suédois. Le Paris-Brest les emmenait à Laval, et leurs grands pieds avides au bord de l’océan via les monts, les forêts et les grèves. Cette longue marche vers l’Ouest d'Henri Queffélec, j’ai souhaité la refaire. Pour aller sur ses traces en marchant, en écrivant. Pour le connaître enfin. » 


Des hommes illustres – Jean ROUAUD
Dans la famille Rouaud, on demande le père : "Les champs d'honneur" nous plongeait dans l'histoire des morts de la famille, Des hommes illustres redonne vie aux chers disparus, et au premier d'entre eux, le père. Père prodigieux qui sait tout : à la fois rendre la justice, réparer les catastrophes, surprendre sa petite famille. Aussi à l'aise dans les rues de Paris que sur les routes de Bretagne, il fédère toutes les énergies et suscite toutes les admirations, celle de son fils bien sûr, mais des autres aussi : pour tout le monde, il est le grand Joseph, celui qui connaît toutes les solutions, tous les remèdes. Mais alors, pourquoi n'a-t-il pas su déjouer le mauvais tour que la mort lui préparait un lendemain de Noël ? On ne meurt pas comme ça, sans prévenir, à 41 ans : en tout cas, c'est ce que croyait le petit Jean avant ce premier « couac » de l'enfance. Avec des mots d'adulte mais un regard d'enfant, Jean Rouaud réveille l'histoire de son père, mêlant les accents du cœur à une juste pudeur.


Le père adopté – Didier VAN CAUWELAERT
Quels drames et quels enjeux faut-il pour qu'un enfant décide de gagner sa vie comme écrivain, à l'âge où l'on perd ses dents de lait ? En révélant ses rapports avec son père, Didier van Cauwelaert nous offre son plus beau personnage de roman. Un père à l'énergie démesurée, à l'humour sans bornes et aux détresses insondables, qui a passé sa vie à mourir et renaître sans cesse. Un père redresseur de torts et fauteur de troubles. Drôle, émouvant et tonique, Le Père adopté est un merveilleux récit des origines et un irrésistible appel à inventer sa vie en travaillant ses rêves.



Franz et François – François WEYERGANS
Le père et le fils sont tous les deux écrivains, c'est tout ce qui les rapproche. Dans les années quarante, Franz connut le succès avec des romans d'inspiration catholique où il est beaucoup question d'amour et de fidélité. François, lui, n'a pas vraiment hérité de l'inspiration paternelle. Ses livres en sont même l'image inversée. Vingt ans après la mort de son père, François s'efforce d'établir avec lui le dialogue qu'ils n'ont jamais eu. L'entreprise peut sembler hasardeuse voire déloyale en l'absence de l'un des protagonistes, pourtant il ne s'agit pas d'un règlement de comptes posthume mais bien d'une joute où chacun prend des risques, assume ses responsabilités, s'efforce enfin de comprendre l'autre et d'une certaine manière reconnaît ses torts. Le résultat est à la fois drôle et poignant car François Weyergans marie plus que jamais une lucidité féroce avec un humour désespéré qui n'épargne personne et surtout pas lui-même. 



Livres proposés par Danielle

Lettre au père – Franz KAFKA
« Très cher père, tu m'as demandé récemment pourquoi je prétends avoir peur de toi. Comme d'habitude, je n'ai rien su te répondre... » Réel et fiction ne font qu'un dans la lettre désespérée que Kafka adresse à son père. Il tente, en vain, de comprendre leur relation qui mêle admiration et répulsion, peur et amour, respect et mépris. Réquisitoire jamais remis à son destinataire, tentative obstinée pour comprendre, la Lettre au père est au centre de l'œuvre de Kafka.








Le crime des pères – Michel del CASTILLO
« J'ai toujours écrit pour éviter de vivre. J'ai toujours fui mon angoisse dans les livres, lesquels contiennent ma vie la plus profonde. Aujourd'hui je n'écris pas une biographie, je ne rassemble pas des souvenirs. s'agit-il d'un roman ? d'une enquête ? Je tente plus simplement de reconstituer un récit qui se déroule à mon insu. Ma démarche relève autant de l'imagination que du témoignage. J'ignore même ce que je cherche. Je suis et poursuis les mots et, si je m'écarte de la partition, la musique sonne faux. Ainsi ai-je accepté de retourner en Espagne, à Huesca où j'ai vécu à la fin de mon adolescence une histoire tissée d'énigmes et jamais achevée. J'aurais dû me méfier, pressentir que j'allais régler un dernier compte, mon propre compte évidemment. »









Ce que le jour doit à la nuit –  Yasmina KHADRA
Algérie, dans les années 1930. Les champs de blés frissonnent. Dans trois jours, les moissons, le salut. Mais une triste nuit vient consumer l'espoir. Le feu. Les cendres. Pour la première fois, le jeune Younes voit pleurer son père. Et de pleurs, la vie de Younes ne manquera pas. Confié à un oncle pharmacien, dans un village de l'Oranais, le jeune garçon s'intègre à la communauté pied-noire. Noue des amitiés indissolubles, françaises, juives : "les doigts de la fourche", comme on les appelle. Et le bonheur s'appelle Émilie, une "princesse" que les jeunes gens se disputent. Alors que l'Algérie coloniale vit ses derniers feux, dans un déchaînement de violences, de déchirures et de trahisons, les amitiés se disloquent, s'entrechoquent. Femme ou pays, l'homme ne peut jamais oublier un amour d'enfance...





Tu verras – Nicolas FARGUES
 Nicolas Fargues raconte que, sur le périphérique, un dimanche, ses deux fils étaient assis à l'arrière de la voiture et une station de radio a passé Don't Matter, d'Akon, une chanson qu'il n'avait jamais entendue jusque-là. Comme elle ne lui plaisait pas, il a voulu changer de fréquence. Mais son fils aîné, qui connaissait les paroles par cœur, l'a supplié de lui laisser l'écouter jusqu'au bout. Un matin, son fils a quitté l'appartement pour l'école comme chaque jour, en lui faisant un signe de la main puis en se retournant, avec son énorme cartable sur le dos et son jean baissé jusqu'à mi-fesses. Attendri, Nicolas Fargues a eu cette pensée étrange et en même temps irrépressible que si son fils venait à mourir brutalement au cours de la journée, il ne pourrait plus jamais écouter cette chanson d'Akon qui ne l'émouvait pourtant pas plus que cela. C'est d'imaginer tout ce qu'il pourrait ressentir qui a été le point de départ de ce roman non autobiographique adopte le motif de l'enfance pour parler d'amour et de solitude.









La fille de son père – Anne BEREST
Trois sœurs que la vie a éloignées se retrouvent chez leur père à l'occasion d'un dîner d'anniversaire. Dans la maison d'enfance, les souvenirs affleurent. Les gestes deviennent nerveux, les langues fourchent et les rancœurs s'invitent autour de la table. Au dessert, un secret de famille est révélé. Une bombe à retardement qui va, sourdement, modifier le quotidien de chacune des filles. Un premier roman acéré, qui sonde les rapports doux-amers de trois jeunes femmes et d'un père.








L'homme qui m'aimait tout bas – Eric FOTTORINO
Mon père s'est tué d'une balle dans la bouche le 11 mars 2008. Il avait soixante-dix ans passés. Toutes ces années, nous nous sommes aimés jusque dans nos différences. Il m'a donné son nom, m'a transmis sa joie de vivre, beaucoup de sa force et aussi une longue nostalgie de sa Tunisie natale. Kinésithérapeute, il travaillait "à l'ancienne", ne s'exprimait qu'avec les mains, au besoin par le regard. Il était courageux, volontaire, mais secret : il préféra toujours le silence aux paroles, y compris à l'instant ultime où s'affirma sa liberté, sans explication. "Ce sont les mots qu'ils n'ont pas dits qui font les morts si lourds dans leur cercueil", écrivit un jour Montherlant. Mon père m'a laissé mes mots et la force d'écrire ces pages pour lui dire mon attachement.








Les Taiseux – Jean-Louis EZINE
« Je ne me suis pas toujours appelé du nom que je porte, et c'est comme si j'avais vécu une autre fois. C'est comme si j'avais été un autre. Mais de cet autre, je n'ai aucun souvenir. J'étais trop jeune pour les souvenirs, quand j'ai cessé d'être lui. Et cependant il a toujours occupé ma pensée, toute ma pensée. Il ne m'arrive rien d'important, ou de misérable, ou de triste ou d'heureux que je n'aie le sentiment étrange de recevoir par délégation. Nous sommes pourtant très différents, lui et moi. Pour commencer, lui avait un père, tandis que moi, je n'ai eu que le manque. Tout, depuis toujours, a gravité autour de ce trou noir ». Les taiseux raconte une vie passée à chercher un père.








Tuer le père – AMELIE NOTHOMB
Pour la plupart des magiciens, jouer au poker sans tricher, c'est un peu des vacances. Rencontrer enfin le hasard, c'est s'encanailler et, autour de cette table, les gens avaient l'air détendu. Sauf un, qui ne parlait ni ne riait et qui gagnait. J'observai. Il pouvait avoir trente ans. Une expression de gravité ne le quittait pas. Dans la pièce, tout le monde le regardait, sauf un homme appuyé au bar. Âgé d'une cinquantaine d'années, il avait une tête magnifique. Pourquoi avais-je l'impression qu'il restait là par défi, pour déranger ? Je rejoignis les buveurs et interrogeai. On me renseigna : celui qui gagnait au poker était Joe Whip et celui qui évitait de le regarder était Norman Terence. L'un et l'autre étaient de grands magiciens américains.
- Il y a un problème entre eux deux ? demandai-je.
- C'est une longue histoire, commença quelqu'un.







L'homme qui ment – Marc LAVOINE
Communiste et charmeur, cégétiste et volage : tel était Lulu, mon père. Menteur aussi, un peu, beaucoup, passionnément, pour couvrir ses frasques, mais aussi pour rendre la vie plus belle et inattendue. Lulu avait toujours une grève à organiser ou des affiches à placarder. La nuit venue, il nous embrigadait, ma mère, mon frère et moi, et nous l’aurions suivi au bout du monde en trimballant nos seaux de colle et nos pinceaux. Il nous faisait partager ses rêves, nous étions unis, nous étions heureux. Evidemment, un jour, les lendemains qui chantent se sont réduits à l’achat d’une nouvelle voiture, et Che Guevara a fini imprimé sur un tee-shirt. Le clan allait-il survivre à l’érosion de son idéal et aux aventures amoureuses que Lulu avait de plus en plus de mal à cacher ? Collègues, voisines, amies ; brunes, blondes, rousses : ses goûts étaient éclectiques. Lulu était très ouvert d’esprit. Sans nous en rendre compte, nous avions dansé sur un volcan. L’éruption était inévitable.





Livre proposé par Maryse

La placeAnnie ERNAUX
« Enfant, quand je m'efforçais de m'exprimer dans un langage châtié, j'avais l'impression de me jeter dans le vide. Une de mes frayeurs imaginaires, avoir un père instituteur qui m'aurait obligée à bien parler sans arrêt en détachant les mots. On parlait avec toute la bouche. Puisque la maîtresse me "reprenait", plus tard j'ai voulu reprendre mon père, lui annoncer que "se parterrer" ou "quart moins d'onze heures" n'existaient pas. Il est entré dans une violente colère. Une autre fois : "Comment voulez-vous que je ne me fasse pas reprendre, si vous parlez mal tout le temps !" Je pleurais. Il était malheureux. Tout ce qui touche au langage est dans mon souvenir motif de rancœur et de chicanes douloureuses, bien plus que l'argent.»













Livre proposé par Rose-Marie
L'exercice de la médecine – Laurent SEKSIK
Léna Kotev, cancérologue à Paris, est issue d'une longue lignée de médecins : Pavel Alexandrovitch exerçait dans la Russie tsariste, Mendel était professeur dans le Berlin des années 1920, Natalia avait été victime de l'affaire du complot des blouses blanches sous Staline. Elle rêve de se soustraire à cette légende familiale mais il n'est pas facile d'échapper à son destin.